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Investissement socialement responsable

La notation ESG souveraine comme outil d’identification des risques de solvabilité

Historiquement, l’intégration de facteurs ESG s’est portée sur les actions et les obligations d’entreprises. Aujourd’hui, l’approche ESG s’étend à l’ensemble des classes d’actifs que l’on retrouve dans un portefeuille. Les émetteurs souverains, « émergents » ou « développés », ne font pas exception avec, depuis quelques années, le développement d’une notation souveraine ESG basée sur une donnée précise et disponible (par exemple sur les questions de climat, de droits humains, d’emploi, ou de gestion des ressources naturelles). Afin de mieux identifier et gérer les risques de crédit liés aux Etats, nombreux sont les investisseurs à intégrer cette évaluation en complément à une analyse traditionnelle portant sur des variables macro-économiques et financières.

La notation ESG appliquée à des titres d’entreprises, actions ou obligations, est aujourd’hui un terme familier à l’oreille de l’investisseur responsable. Depuis plusieurs dizaines d’années, des agences de rating spécialisées dans l’évaluation extra-financière produisent de telles notations, en s’appuyant sur des approches et des méthodologies qui leur sont propres. L’objectif principal de la note consiste à résumer la capacité globale de l’entreprise à faire face aux défis principaux en matière de durabilité sur les trois dimensions environnementale, sociale et de gouvernance. Malgré les débats en cours sur la qualité des données ESG et la différence importante de ratings pour une même société, l’idée d’intégrer des critères ESG pour évaluer une entreprise s’est imposée. Cette notation extra-financière s’est étendue progressivement à d’autres classes d’actifs importantes, dont les obligations émises par des entités souveraines, soit des gouvernements de pays « développés » ou « émergents ». La pandémie, conjuguée aux effets du changement climatique, a fait exploser la dette souveraine, atteignant USD 65.4 trillion en 2021, selon Janus Henderson Sovereign Debt Index. Au-delà d’une volonté commune de prévenir le risque ESG, la comparaison entre analyses de durabilité des entreprises et des entités souveraines s’arrête rapidement, essentiellement en raison de leur nature très différente. 

Objectifs de la notation ESG souveraine

Traditionnellement, les analyses de risques de crédit sur les émetteurs souverains prennent en compte des variables macro-économiques et financières, comme l’état des finances d’un pays, la structure de son PIB, son rythme de croissance, etc. On retrouve indirectement, dans cette analyse classique, des dimensions qui sont en lien avec le pilier G de la gouvernance, si l’on pense à l’état de droit, à la stabilité politique et au bon fonctionnement des institutions, enjeux importants pour l’investisseur. L’intégration poussée de critères ESG va élargir le champ de cette analyse, la compléter en mettant en avant de nouveaux risques – cette fois-ci, extra-financiers. Ce sont des risques environnementaux, sociaux ou de gouvernance existants, latents ou potentiels auxquels les émetteurs souverains sont structurellement exposés mais également des risques liés à la mauvaise gestion politique et économique des Etats. Des risques qui ont une incidence certaine sur la capacité des Etats de rembourser leurs dettes et donc sur leur notation financière. Les exemples de ce « lien », direct ou indirect, entre solvabilité et performance ESG, sont nombreux

Performance ESG et solvabilité des Etats : une corrélation importante

L’incidence majeure de la gouvernance est reconnue. Si l’on pense à l’actualité récente, la démission de Mario Draghi de son poste de premier ministre du gouvernement italien en juillet dernier, point d’orgue de graves problèmes de gouvernance, rend encore plus incertaine la perspective de voir l’Italie régler le préoccupant problème de la dette de manière sereine (150% du PIB en 2022). Moody’s a d’ailleurs baissé le rating du pays de « stable » à « négatif » en août. En Suisse, sur le plan social, intuitivement, on voit un lien se dessiner entre, par exemple, la fameuse et historique « paix du travail », la bonne marche de l’économie en termes de productivité et la capacité de la Confédération de rassurer ses créditeurs en tant qu’emprunteur. Sur le plan environnemental, la corrélation est moins évidente mais on comprend qu’un Etat comme le Brésil, dont 20% du PIB provient de l’exportation de ressources naturelles, fait face à l’enjeu stratégique de gérer au mieux sa forêt amazonienne. On ne parle même pas de l’incidence sur la dette des dépenses faites par les Etats pour s’adapter aux effets croissants et négatifs du changement climatique

L’intégration de données et la création d’un rating ESG souverain

Comme pour les entreprises, la donnée ESG est centrale pour mesurer la performance ESG des souverains sur tel ou tel enjeu matériel, que cela soit l’état des droits humains, l’égalité des genres, la gestion de l’eau ou la protection de la biodiversité, et finalement attribuer un rating ESG agrégé. Des organisations internationales et des ONGs, comme la Banque Mondiale, l’OCDE, Transparency International, Freedom House, publient aujourd’hui une multitude d’informations détaillées, pertinentes et accessibles au public. Elles servent de base à la notation ESG des agences de rating spécialisées – comme ISS, Beyond Ratings, Sustainalytics ou MSCI – ou à la recherche menée par les investisseurs eux-mêmes

La critique réside non pas dans la qualité des données mais dans les méthodologies employées par les agences de rating pour les exploiter afin d’en tirer une notation globale.  Entre autres biais sur lesquels porte la critique, on retrouve la question de la distorsion des revenus : par rapport aux souverains émergents, les Etats dits « développés » obtiennent généralement des ratings ESG supérieurs, en raison notamment des ressources à disposition pour développer des politiques ambitieuses. Cela met en danger la capacité d’un Etat, comme le Costa Rica par exemple (pourtant un leader sur le plan environnemental), à lever du financement pour son développement. Une autre critique récurrente – que l’on retrouve aussi pour la notation des entreprises – concerne la pondération accordée aux dimensions E, S et G par les agences spécialisées. Selon leur propre méthodologie, elles vont utiliser des poids différents menant à des divergences de notation plus ou moins importantes, pouvant provoquer une certaine confusion pour des investisseurs, habitués au consensus des agences de crédit, dans une certaine confusion.

Face à ce constat, il est de la responsabilité de l’investisseur de consacrer les ressources nécessaires pour choisir attentivement la méthodologie qui correspond le mieux à ses valeurs et convictions ESG ou, idéalement, de construire sa propre notation sur les souverains ESG. En dépit de ces quelques questionnements, la valeur ajoutée d’une analyse ESG souveraine, comme complément à l’analyse de risques de crédit, fait aujourd’hui consensus.

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